La société SAS Ingram Micro, dont l’unique actionnaire se situe au Delaware, s’est vue appliquer la procédure d’abus de droit dans un arrêt du Conseil d’État du 13 janvier 2017 n°391196. En l’espèce, la société française a procédé à une distribution de son report à nouveau, par voie de dividendes, à son actionnaire unique. Dans le même temps, cet actionnaire a bénéficié d’obligations remboursables en actions (ORA). Celles-ci ont donné lieu au paiement d’intérêts que la société française a déduit de son résultat imposable et qui n’ont pas été imposés aux États-Unis.
Pour rappel, la procédure d’abus de droit fiscal permet à l’administration d’écarter les actes fictifs, qui recherchent le bénéfice de l’application littérale d’un texte ou vont à l’encontre des objectifs fixés par le législateur dans le but de diminuer la charge fiscale. La qualification d’abus de droit entraîne le redressement des sommes éludées ainsi que l’application d’une majoration de 80%.
Dans le cas d’espèce, le Conseil d’État a juge que l’opération dans son ensemble était constitutive d’un abus de droit fiscal puisque les opérations, de nature contradictoire, n’ont servi qu’à permettre la déduction d’intérêts financiers en France. La société aurait pu intégrer son report à nouveau à son capital, plutôt que d’augmenter ses charges financières déductibles par l’émission d’ORA.
Le Conseil d’État a rejeté les justifications économiques de la société requérante qui soutenait que la réduction des capitaux propres suite à la distribution avait augmenté la réserve spéciale de participation des salariés aux résultats de l’entreprise. Par ailleurs, la société arguait d’une volonté de restructuration que le Conseil d’État a écarté au motif que la totalité de ses titres étaient toujours détenue par le même actionnaire suite à ces opérations.
Selon la haute juridiction, la réalisation des opérations en cause n’a conduit qu’à un jeu d’écritures comptables, sans mouvement financier, qui n’avait d’autre but que d’atténuer la charge fiscale qu’aurait du supporter la société.
L’Administration était donc fondée, selon le Conseil d’Etat, à remettre en cause la déductibilité des intérêts et à appliquer une majoration de 80% au titre de l’abus de droit fiscal.
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